DISCOURS du Mercredi 12 Nov 2014 par le Principal du Collège de Bourbon M. Ibrahim CADJEE à l’occasion de la commémoration du centenaire de la Grande Guerre en hommage aux anciens élèves du Lycée Leconte de Lisle morts au Champ de bataille

 

Monsieur Le Préfet de la Région Réunion

Madame La Présidente du Conseil Général

Monsieur Le Recteur d’Académie

Monsieur l’Inspecteur d’Académie

Mon Général, Commandant Supérieur des FAZSOI

Mesdames et Messieurs les Descendants de nos vaillants soldats

Messieurs les Présidents des Associations d’Anciens Combattants

Mesdames et Messieurs Les Inspecteurs

Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etablissement

Mesdames et Messieurs les Professeurs

Mesdames, Messieurs

Chers élèves

Je vous souhaite la bienvenue au Collège de Bourbon, dénommé successivement « lycée impérial, lycée de Bourbon, puis lycée Leconte de Lisle jusqu’en 1969 »

Vous vous trouvez là dans le plus vieux lycée de la Réunion dont la construction a été décidée par Napoléon et qui fêtera son bicentenaire en 2018. Jusqu’en 1969, cet établissement fut le seul lycée de garçons de l’île ( le premier lycée de filles –lycée Juliette Dodu – a été construit au début des années 1900).

Le lycée Leconte de lisle accueillait jusqu’en 1969 des garçons de la 6ème à la Terminale sélectionnés dans toutes les écoles primaires de la Réunion, autant dire, l’élite scolaire de notre population.

Pour planter le décor ou le contexte : Je rappelle que la Réunion en 1914 est encore colonie française, avec pour Chef Administratif un Gouverneur nommé par le Gouvernement. La Réunion ne compte à peine que 170 000 habitants, les communications sont difficiles : le télégraphe et la radio aléatoires, le courrier postal arrive , certes, avec retard car La Réunion est à deux mois de bâteau de la Métropole , la conscription (service militaire) en vigueur que depuis 1913 . Lors de la Grande Guerre, 15 000 réunionnais s’engagent . Seuls 1000 soldats ont été reconnus « morts pour la Patrie ».

Et en 1914, le feu et la fureur s’abattent sur l’Europe, la guerre mobilise en France les militaires Actifs et de Réserve . On imagine alors à la Réunion avec un certain décalage le bruit des canons , et dans la cour de ce lycée plutôt paisible, des jeunes gens , élite scolaire d’alors, dans la force de l’âge, sans aucune formation militaire, s’interrogent et décident   de se porter volontaires pour aller au front et défendre le drapeau français qui flotte à l’entrée de ce lycée.

Quelle inconscience ? diront certains. Quel engagement ! diront d’autres.

Imaginons un instant la douleur et le déchirement de ces familles, des mères et pères serrant sur leurs cœurs , dans une étreinte interminable, leurs jeunes garçons prêts à embarquer au Port de la Pointe des Galets sur des rafiots pour un destin incertain et inconnu !

Pourtant, ces jeunes réunionnais ne peuvent soupçonner ce qui les attend à 10 000Km de leur île natale . Tous, s’attendent à une guerre courte, mais ils vont la connaître longue et meurtrière, les tranchées et   le feu , côtoyer chaque jour les bléssés et les morts , affronter le froid et la faim, la boue et les rats, les grenades et pire encore le gaz sarin dit « gaz moutarde », les souffrances et les amputations dûes à la gangrène des membres à cause des plaies mal soignées, faute d’antibiotique.

Tout cela, ils l’ont fait et tout cela ils l’ ont enduré , pour un idéal : défendre l’Honneur de notre pays , défendre la Liberté , la souveraineté et l’intégrité de notre Nation bafouée par la violation d’un traité international, à savoir : la neutralité de la Belgique. En 1914, le ministre allemand Betmann Hollweg disait à propos de ce traité : «  En quoi l’Allemagne devrait-elle respecter ce chiffon de papier ? » Et, pendant que l’Armée française est massée du côté des Ardennes, et attend l’arme aux pieds, , les troupes allemandes passent par la Belgique et envahissent la France par une frontière franco-belge dégarnie. Notre Etat-major, pris de court, mobilisait alors « les fameux taxis de la Marne » pour transporter les soldats au front !

Qui aurait pensé que de petits réunionnais , d’une lointaine colonie, seraient capables de noblesse d’âme , de sentiments patriotiques et prêts à donner de leurs vies pour cette Terre que l’on aime tant, la Terre de Notre France !

Dans cette même cour d’Honneur où nous sommes réunis ce soir, il y a un siècle, ces jeunes lycéens y jouaient, ils fréquentaient les murs , les salles de classes et l’internat de ce lycée , ils s’appelaient : Maurice, Victor, Joseph, Edouard et les autres....

Camarades de classe un jour, Camarades d’Infortune le lendemain, mais Frères d’armes et de sang mêlés pour toujours.

MME la Présidente, M Le Recteur, tout à l’heure, vous allez dévoiler la plaque commémorative de ces sacrifiés , vous rendez ainsi hommage à leur mémoire, à leurs descendants, et à travers eux , à ce lycée , si fier d’avoir compté parmi ses élèves, de braves soldats , de grands patriotes !

Ce travail de mémoire a été initié par deux de nos professeurs . Je remercie vivement MME MASSON et MME AGBALE qui ont su motiver leurs élèves pour un VRAI travail de recherche historique aux archives départementales, la recherche et la rencontre des descendants de nos vaillants soldats tombés au champ de bataille.

Gageons que ce travail aura suscité quelque vocation de futurs historiens !

Et pour conclure :

Que seraient la sueur et les larmes ? si l’Histoire ne servait pas le présent ?

Ces Hommes ont donné un sens à leur vie, le sens aussi , à un mot qui dépasse les clivages politiques, et le débat du moment présent : la continuité térritoriale.....MORALE et Fraternelle !

ils ont donné un sens à un autre mot :   la REPUBLIQUE :

Cette République que nos jeunes lycéens du lycée Leconte de Lisle ont voulu défendre : c’est la REPUBLIQUE Une et Indivisible !